Selon une citation attribuée à Confucius, “nous avons tous deux vies et la seconde commence quand on se rend compte qu’on en a qu’une”. Si certains d’entre nous sont particulièrement fragiles face au virus, cette catastrophe nous a rappelé – ou plutôt nous a fait comprendre – combien nous sommes tous vulnérables, ce que nous avions voulu occulter. Notre impréparation est à ce titre le résultat d’un d’orgueil dont nous payons chèrement le prix.
Nous ne pouvons plus prendre nos désirs pour des réalités et nous  cantonner trop paresseusement à des éléments de forme sans aborder les questions de fond de nos systèmes. Ainsi, vous questionnez, très justement à mon sens au singulier, la réponse sanitaire, sociale et médico-sociale à avoir. Nous ne pouvons plus avoir un système éparpillé en de multiples silos qui ne se parlent pas. Avec le confinement nous avons découvert de manière intime la valeur des autres, la richesse de faire société, le bonheur du contact et la chance de la proximité.
De même, les réformes à conduire devront nécessairement donner voix à ce que nous venons de (re)découvrir comme essentiel : la lutte contre la solitude et les discriminations de toutes sortes, la recherche de solutions justes et raisonnées pour l’hôpital et la ville, et enfin la préservation de la liberté de pouvoir se soigner grâce à la solidarité de tous et pour chacun.
Pour cette construction à venir, l’individu et le groupe, soi et les autres, devront être associés à chaque phase du processus afin qu’il soit juste et pérenne. Certains pourront y voir une contrainte supplémentaire impraticable ; choisissons résolument de considérer qu’il s’agit là d’une chance pour un « monde d’après » plus viable, répondant exactement à cette « démarche de responsabilité et de solidarité » que prônait le CCNE dans son dernier avis de mars dernier sur les mesures de protection vis-à-vis des personnes âgées dépendantes…

Pr Sadek Beloucif
Chef du Service d’Anesthésie-Réanimation – Hôpital Avicenne – Mai 2020